Vu sur les manchettes du Matin, le 29 mai 2013 : »Série noire : 20 meurtres commis en 22 semaines en Suisse ! »
Prenez peur, braves citoyens, tremblez : la Suisse fait face à une « série noire » de meurtres. On compte 20 meurtres en 22 semaines dans notre pays. C’est ce que le quotidien aux manchettes jaune vif nous annonce ce matin. Je ne sais pas comment auront réagi les personnes qui ont croisé ces manchettes aujourd’hui, mais je m’en inquiète. A priori, cela fait peur et donne l’impression que le pays est dans une situation sécuritaire catastrophique. Qu’en est-il en réalité ?
Eh bien, nous avons là affaire à la fabrication d’une actualité bidon, une mise en scène qui ne correspond à rien. En effet, le Matin brandit 20 meurtres en 22 semaines, comme si cela était exceptionnel et terrifiant (une série noire !). Et pourtant, cela n’a rien d’extraordinaire ou d’anormal. 20 meurtres en 22 semaines, cela correspond à environ 0,9 meurtres par semaine. Or, pendant l’année, on compte en Suisse plus d’un meurtre par semaine, comme en témoigne l’office fédéral de la statistique :
1,9 meurtres par semaine en 2007,
2,1 en 2008,
1,9 en 2009,
1,6 en 2010,
1,3 en 2011
Ces 20 meurtres en 22 semaines représentent donc moins d’homicides que la moyenne habituelle. Il ne s’agit donc pas d’une série noire, mais plutôt d’une relativement bonne nouvelle. Et voilà comment un journal donc le succès – très relatif – est basé sur les faits divers sordide et les futilités « people » entretient la peur nécessaire à vendre son pitoyable boniment…
Pour bien enfoncer le clou, la première page du journal revient à la charge : « Un meurtre par semaine« , et colle un revolver comme décoration explicite… La raison d’être du journal, c’est quoi : informer ou terroriser ?
Faire croire, à partir d’une statistique rassurante, à une série noire de meurtres, c’est ici tout simplement un énorme mensonge. En grosses lettres, à la face de tous : ils n’ont manifestement plus aucune honte à fabriquer du faux.
Daniel
PS : pour l’anecdote, le site du Matin titre aussi aujourd’hui que le nombre de meurtres à New York est « historiquement bas« . Or, si la ville américaine a vu le nombre d’homicides passer de 515 à 414, il n’en reste pas moins que 414 meurtres pour 8,4 millions d’habitants de la ville, cela reste encore beaucoup. En Suisse, avec un peu plus de 8 millions d’habitants, on dénombre entre 69 et 109 meurtres par an sur les 5 dernières années. Bien sûr, il n’est pas surprenant qu’un grande ville ait un taux sensiblement plus élevé qu’un Etat comme la Suisse, mais il semble que les rédacteurs du Matin ont de la difficulté avec les proportions…
Il existe beaucoup de périodiques publiés en Suisse romande… j’essaie de tous les retrouver !
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Malgré un certain recul, la presse de Suisse romande est encore assez vivace. Avec ce billet, j’essaie de faire un inventaire des publications périodiques plus ou moins généralistes en français des cantons romands. Ma liste est très certainement encore incomplète et j’espère ne pas en avoir oublié trop…
Alors, s’il apparaît qu’il manque l’une ou l’autre publications, n’hésitez pas à me le faire savoir !
Je compléterai au fur et à mesure… Daniel
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Les quotidiens
La Liberté : quotidien fribourgeois
Le Temps : quotidien à vocation nationale
24 heures : quotidien vaudois
La Tribune de Genève : quotidien genevois
L’Agefi : quotidien économique
Le Courrier : quotidien romand
Le Matin : quotidien romand
20 minutes : quotidien pendulaire
Le Quotidien jurassien : quotidien du canton du Jura
Le Journal du Jura : quotidien du Jura bernois
L’Impartial/L’Express : quotidien neuchâtelois
Le Nouvelliste : quotidien valaisan
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Les revues et les magazines
L’Hebdo : hebdomadaire romand
Bilan : mensuel économique
Pages de gauche : mensuel de gauche
La Nation : bimensuel conservateur
Le Confédéré : hebdomadaire valaisan (organe des radicaux valaisans)
La Revue durable : bimensuel écologique
L’illustré : hebdomadaire pour se distraire
Horizons et débats : hebdomadaire politique inclassable
L’événement syndical : hebdomadaire syndical romand
L’écho magazine :hebdomadaire chrétien
Terre et Nature : hebdomadaire les pieds dans la terre
Edito : magazine bimestriel consacré aux médias
Plaidoyer : magazine bimestriel consacré au droit et à la politique (organe des juristes progressistes suisses)
Swissquote : magazine financier
La Salamandre : bimestriel sur la nature
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Les périodiques régionaux
La Gruyère : journal plurihebdomadaire du sud-fribourgeois
La Côte : journal de la côte lémanique
Journal de Morges : hebdomadaire de la région morgienne
GHI : hebdomadaire gratuit genevois à petites annonces
Lausanne-Cités : hebdomadaire gratuit lausannois à petites annonces
L’objectif : bimensuel fribourgeois
La Broye : hebdomadaire broyard
Journal de Sierre : bimensuel gratuit de Sierre
ArcHebdo : hebdomadaire gratuit de l’arc jurassien
Biel-Bienne : hebdomadaire gratuit de la région de Bienne
Feuille d’avis de la Vallée de Joux : périodique des Combiers
Le Régional : hebdomadaire gratuitde la Riviera vaudoise
Journal de Cossonay : hebdomadaire de la région de Cossonay
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Les périodiques thématiques
L’essor : bimestriel à numéros thématiques
Bon à Savoir : mensuel consumériste
Tout compte fait : mensuel économique consumériste
FRC magazine : mensuel consumériste
Femina : hebdomadaire féminin
La Vie économique : bulletin du S.E.C.O. (Secrétariat d’état à l’économie)
Touring : organe du T.C.S. .
Les satiriques
La distinction : bimestriel satirique
Vigousse : hebdomadaire satirique
La Tuile : journal satirique jurassien
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Les revues universitaires
Allez Savoir ! : magazine bimestriel gratuit de l’université de Lausanne
Campus : magazine bimestriel gratuit de l’université de Genève
Reflex : revue de l’EPFL
L’auditoire : journal des étudiants de l’UNIL et de l’EPFL
Flash : mensuel interne de l’EPFL
L’Uniscope : mensuel de l’université de Lausanne
Spectrum :journal des étudiants de l’université de Fribourg
Universitas : journal de l’université de Fribourg
Le Cafignon : journal des étudiants de l’université de Neuchâtel
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Les périodiques publiés par des entreprises
Migros magazine : publication de la Migros
Coopération : publication de la Coop
Moneta : journal de la Banque alternative
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Les périodiques passés sur Internet
Domaine public : hebdomadaire publié sur internet
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Les projets en cours…
La Cité : projet de journal bimensuel (à la recherche d’abonnés fondateurs)
Ithaque : trimestriel à paraître dès juin 2011
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Quelques sites internet pour compléter cette liste
Commentaires.com : e-magazine non-conformiste conservateur
Politblog : blog politique bilingue de Tamedia, en vue des élections fédérales
La Méduse : site participatif d’information, bilingue
Lausanne Bondy blog : blog lausannois sur le modèle du Bondy blog
Swissinfo : plateforme d’info multilingue de la RTS
Largeur.com : e-magazine généraliste
Combats.ch : site d’information de gauche
Courants d’idées : site d’opinion
Un journalisme qu’on dit à l’agonie, mais qui a encore des projets…
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Il est de bon ton d’évoquer des médias en perdition, chez nous comme ailleurs : une presse en papier qui ne se vend plus assez et qui peine à capter les annonces publicitaires nécessaires à l’équilibre de son budget, une « solution Internet » qui ne trouve toujours pas un modèle économique capable de la financer et un public qui se serait habitué à la gratuité. Au surplus, la Suisse romande offre un marché assez petit : moins de deux millions d’habitants… et combien soucieux de leur information ? Il y aurait de quoi être pessimiste.
Parallèlement, l’information semble en train de se couper en deux. D’un côté, les « news » (je ferai pénitence pour cet anglicisme…), qu’on trouve aisément sur des agrégateurs d’informations comme Romandie.com. On peut trouver aussi la part la plus racoleuse des ces « infos » dans les journaux gratuits et dans « Le Matin« : les accidents, les faits divers, mais bien peu d’informations politiques, économiques et sociales. Quant à l’international… bof ! D’un autre côté, on trouve des quotidiens qui se maintiennent comme « Le Temps« , « La Liberté » ou « Le Courrier » ou des périodiques plus ou moins spécialisés (Bilan, l’Hebdo, Domaine public sur Internet, la Nation). C’est vraiment comme si la scène de l’information se scindait en deux : une info brève et vite oubliée pour occuper l’ennui des transports publics ou satisfaire ceux qui ne s’y intéressent pas plus, une info plus recherchée pour ceux qui sont prêts à y consacrer quelques deniers et un certain temps de lecture. Une forme de fracture médiatique… Là aussi, il y aurait de quoi être pessimiste.
Loin de ce pessimisme apparent, il y a pourtant depuis quelques temps floraison de nouveaux projets. Certains misent sur Internet, d’autres compte sur une diffusion imprimée… comme à contre-courant.
L’an passé est apparu l’hebdomadaire satirique Vigousse, dont j’ai attendu le 4e numéro pour me laisser convaincre et m’abonner. Surprise : ce n’est pas la partie humoristique qui m’a le plus convaincu, mais les enquêtes. Comme si Vigousse avait décidé de se charger des enquêtes que les quotidiens ne font plus… Parmi les arrivés récents, il faut aussi compter des sites Internet comme Combats.ch ou La Méduse. Mais des médias spécialisés sont aussi venus se joindre au mouvement : je note en particulier Edito (consacré aux médias) et Plaidoyer (spécialisé dans les questions juridiques). Ces diverses apparitions sont grosso modo celles de l’an passé.
Mais l’année 2011 commence en fanfare. Le numéro zéro de « La Cité » est déjà dans les kiosques. Il s’agit d’un journal grand format (comme celui du Monde diplomatique) qui se propose d’approfondir des informations à un rythme bihebdomadaire. A peine le temps de se le procurer et un nouveau projet apparaissait sur les réseaux sociaux : Ithaque. C’est aussi un périodique promis à une forme « papier », mais trimestriellement. Dans la perspective des élections fédérales, un blog politique intitulé très banalement « Politblog » se propose lui aussi d’animer les discussions. Et il y a encore le projet d’Ueli Windisch d’un média explicitement « de droite » (décomplexée ?) encore dans les limbes mais qui fait plus parler de lui que tous les autres ensemble.
Et tout cela sans compter ceux qui sont apparus peu avant et tous ceux que j’ai oubliés. La Suisse romande s’enorgueillissait d’une étonnante pluralité de titres qui ont disparu dans les combats de la concentration économique (voir l’ouvrage de Campiche et Aschinger). Rien n’est toutefois définitivement perdu… la diversité sortie par la porte semble revenir par la fenêtre. C’est une bonne nouvelle !
Daniel
Site de « 20 minutes », le 31 janvier 2010 : Les détrousseurs ne sont pas allés loin
http://www.20min.ch/ro/news/faits_divers/story/28664303
Sur les auteurs de délits et leurs victimes, il est important de tout savoir. Alors, pourquoi se contenter de leurs âges et de leurs nationalités ?
Dis… plôme !
Titulaires d’un CFC, d’un brevêt secondaire et d’une maturité et âgés de 17 à 21 ans, ils ont d’abord pris quelque 200 francs dans le porte-monnaie d’un titulaire d’un CFC de 18 ans. Ils ont ensuite dérobé une centaine de francs et une cinquantaine d’euros à un titulaire d’un diplôme de commerce de 19 ans. Les deux victimes ont prévenu la police qui a pu rapidement pu appréhender les agresseurs. Ces derniers ont en vain tenté de fuir en apercevant les agents, a précisé lundi la police municipale composée de titulaires de diplômes.
Tiré par les cheveux
Brun, noireaud et rouquin et âgés de 17 à 21 ans, ils ont d’abord pris quelque 200 francs dans le porte-monnaie d’un blond de 18 ans. Ils ont ensuite dérobé une centaine de francs et une cinquantaine d’euros à un châtain de 19 an. Les deux victimes ont prévenu la police qui a pu rapidement pu appréhender les agresseurs. Ces derniers ont en vain tenté de fuir en apercevant les agents, a précisé lundi la police municipale blonde.
Métiers
Un boucher, un cordonnier et un bijoutier, âgés de 17 à 21 ans, ont d’abord pris quelque 200 francs dans le porte-monnaie d’un tisserand de 18 ans. Ils ont ensuite dérobé une centaine de francs et une cinquantaine d’euros à un relieur de 19 ans. Les deux victimes ont prévenu la police qui a pu rapidement pu appréhender les agresseurs. Ces derniers ont en vain tenté de fuir en apercevant les agents, a précisé lundi la police municipale zurichoise.
Apparences…
Un gras du bide, un petit maigrelet et un sportif élancé, âgés de 17 à 21 ans, ont d’abord pris quelque 200 francs dans le porte-monnaie d’un porteur de lunettes de 18 ans. Ils ont ensuite dérobé une centaine de francs et une cinquantaine d’euros à un chauve de 19 ans. Les deux victimes ont prévenu la police qui a pu rapidement pu appréhender les agresseurs. Ces derniers ont en vain tenté de fuir en apercevant les agents, a précisé lundi la police municipale zurichoise.
Quant à l’original… :
Originaires d’Angola, du Congo et de Belgique et âgés de 17 à 21 ans, ils ont d’abord pris quelque 200 francs dans le porte-monnaie d’un Macédonien de 18 ans. Ils ont ensuite dérobé une centaine de francs et une cinquantaine d’euros à un Suisse de 19 ans. Les deux victimes ont prévenu la police qui a pu rapidement pu appréhender les agresseurs. Ces derniers ont en vain tenté de fuir en apercevant les agents, a précisé lundi la police municipale zurichoise.
Daniel
Dans les médias suisses et internationaux – fin octobre 2010
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J’ai déjà eu l’occasion de le signaler à plusieurs reprises, je suis un admirateur de l’ouvrage « 1984″ de George Orwell, que je conseille à tout un chacun de lire : c’est une oeuvre majeure du XXe siècle. Ecrit en 1948, il n’avait pas pour but de livrer une prophétie rigoureuse et précise, mais d’évoquer un monde totalitaire. L’auteur anglais a eu des intuitions très justes. Entre lui et son compatriote Aldous Huxley (« Le meilleur des mondes »), ils ont mis à jour certaines des plus grosses ficelles de la manipulation politique et sociales contemporaine…
Et il suffit que j’ouvre mon journal ce matin pour penser encore une fois à lui :
« Comme d’habitude, le visage d’Emmanuel Goldstein, l’Ennemi du Peuple, avait jailli sur l’écran« .
George Orwell – 1984
Cet extrait d’un court enregistrement sonore, diffusé mercredi par la chaîne de télévision Al-Jazira, émane d’Oussama ben Laden, chef emblématique d’Al-Qaida. Il est adressé au « peuple français » (…)
Le Temps – 28 octobre 2010
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« Goldstein débitait sa venimeuse attaque habituelle contre les doctrines du Parti. Une attaque si exagérée et si perverse qu’un enfant aurait pu la percer à jour, et cependant juste assez plausible pour emplir chacun de la crainte que d’autres, moins bien équilibrés pussent s’y laisser prendre« .
George Orwell – 1984
La menace terroriste en France est « réelle » et la « vigilance est totale », a déclaré mercredi le ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, après les menaces proférées contre la France par le chef d’Al-Qaïda, Oussama ben Laden
24 heures – 28 octobre 2010
«Les choses se précisent», s’inquiète Alain Rodier. Selon lui, la question n’est pas de savoir s’il y aura un attentat en France, «mais où et quand».
Le Temps – 28 octobre 2010
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« Par ailleurs, voir Goldstein, ou même penser à lui, produisait automatiquement la crainte et la colère« .
George Orwell – 1984
Le chef d’Al-Qaïda, Oussama ben Laden, a affirmé que la France ne connaîtrait la sécurité que si elle se retirait d’Afghanistan (…)
24 heures – 28 octobre 2010
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« Mais l’étrange était que, bien que Goldstein fût haï et méprisé par tout le monde, bien que tous les jours et un millier de fois par jour, sur les estrades, aux télécrans, dans les journaux, dans les livres, ses théories fussent réfutées, écrasées, ridiculisées, que leur pitoyable sottise fût exposée aux regards de tous, en dépit de tout cela, son influence ne semblait jamais diminuée« .George Orwell – 1984
L’organisation a déjà émis plusieurs messages de menaces contre la France cette année. Le dernier message du chef d’Al-Qaïda avait été diffusé début octobre.
Site de la TSR – 27 octobre 2010
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« Goldstein, en dépit de son isolement, de son impuissance et du doute qui planait sur son existence même, semblait un sinistre enchanteur capable, par le seul pouvoir de sa voix, de briser la structure de la civilisation« .
George Orwell – 1984
« Tout comme vous tuez, vous êtes tués. Tout comme vous prenez des prisonniers, vous êtes pris en otages. Comme vous mettez en péril notre sécurité, nous mettons aussi votre sécurité en péril », ajoute-t-il (Ben Laden).
Site de la TSR – 27 octobre 2010
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« Goldstein s’était enfui, et se cachait nul ne savait où »
George Orwell – 1984
Une autre nouveauté: «Jamais Oussama ben Laden n’avait fait référence aux prises d’otages au Niger (ndlr: où cinq otages français ont été kidnappés en septembre par les hommes d’Al-Qaida au Maghreb islamique).»Une preuve que le chef terroriste «ne vit pas au fond d’une grotte, et qu’il est au fait de l’actualité».
Le Temps – 28 octobre 2010
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En fin d’ouvrage, lors de la torture infligée au héros Winston, celui-ci apprend que « Goldstein et ses hérésies vivront à jamais. Tous les jours, à tous les instants, il sera défait, discrédité, ridiculisé, couvert de crachats. Il survivra cependant toujours« .
En ne me servant que de textes publiés depuis hier par les médias suisses, je n’ai pas pris le temps de rechercher des textes d’actualité collant « parfaitement » aux termes du livre d’Orwell, bien que ceux-ci existent. Mais je pense que les phrases de l’auteur britannique vont sembler suffisamment familières à tous les « consommateurs » d’actualités.
La littérature peut être très instructive…
Daniel
Le Temps du 23 octobre 2010 : « Imaginons une chaîne de TV bilingue »
http://www.letemps.ch/Page/Uuid/8c80987e-de1c-11df-9b0b-e47316d37edf/Imaginons_une_TV_bilingue
En ce samedi 23 octobre, interview de la Présidente de la Confédération dans « Le Temps » : le quotidien indique en sous-titre que « la présidente de la Confédération souhaite développer le plurilinguisme grâce à la loi fédérale sur les langues« . Le lecteur romand s’attaque instinctivement à la lecture…
Surprise positive : Mme Leuthard comprend la frustration romande liée à la priorité zurichoise à l’anglais dans les écoles et tient à rassurer les minorités : « Je vois d’ailleurs que Zurich a entrepris de renforcer aussi l’enseignement du français dans la scolarité obligatoire. Par ailleurs, nous avons quatre langues nationales qu’il faut respecter. Et notamment l’italien que nous avons trop tendance à oublier. Nous devons faire attention à ne pas perdre le contact avec les Tessinois qui auraient beaucoup de raisons de se plaindre. C’est l’esprit du plurilinguisme, plus que le débat sur les priorités linguistiques, que nous devons encourager en Suisse« .
Bien, très bien… Mais l’interview continue et Mme Leuthard évoque une autre idée : « Depuis le début de l’année, nous avons une loi fédérale sur les langues et la compréhension qui donne des moyens d’intervention à la Confédération. L’idée d’une chaîne bilingue et, pourquoi pas, de journaux bilingues est intéressante« .
Et paf… on glisse sans transition au « bilinguisme »… et les italophones (remarque au passage : tous ne sont pas Tessinois…) ont été oubliés après une petite vingtaine de lignes. On a vraiment trop « tendance à les oublier« . Et l’intervieweur qui ne pipe mot… !
Alors, oui… Mme Leuthard… résolument oui à des médias plurilingues : une télévision (avec les trois ou mieux les quatre langues – au moins quelques émissions en romanche, avec des sous-titres pour aider) et pourquoi pas des journaux. Avec l’aide de la Confédération, oui encore… Pourquoi pas une sorte de « Courrier international » suisse avec traduction des articles intéressants parus dans la semaine écoulée dans les diverses régions linguistiques ?
Mais lorsqu’on passe en quelques lignes de quatre à trois puis à deux langues, quelques minutes suffiront malheureusement à en revenir tout simplement à « chacun chez soi et bonjour chez vous« … Dommage !
Daniel
« Le Matin » et « 20 minutes » du 14 août 2010 : La baisse de qualité des médias s’effiloche et pèse sur la démocratie suisse
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Qui l’eût cru ? Les journaux de caniveau qui s’inquiètent tout à coup de la qualité des médias… A moins qu’ils n’aient copié-collé la dépêche de l’ATS sans même la lire !
Voyez plutôt le contenu de l’article ainsi publié par les leaders de la « malpresse » : « Manque de moyens financiers, émergence des gratuits et des informations en ligne concourent à une péjoration de l’offre médiatique en Suisse, selon une étude de l’Université de Zurich publiée vendredi. Cette mutation a aussi pour conséquence d’affaiblir le débat démocratique. » Et paf !
« La culture de gratuité des médias en ligne et des journaux pour pendulaires a fait perdre conscience aux consommateurs que le journalisme professionnel a un prix« . Et repaf !
« Cette tendance sape la qualité des médias d’information, favorise leur concentration, affaiblit le prestige professionnel des journalistes » (…). « Le public lit ainsi davantage de sujets «people» ou émotionnels au détriment des analyses et des dossiers politiques. Or c’est avec les médias que naît le débat public en démocratie. Il s’en trouve ainsi fortement affaibli« . BANG !
Et ce sont bien le journal gratuit « 20 minutes » ainsi que son ombre « Le Matin » (qui vaut à peine mieux…) qui publient ce texte sans sourciller.
Les journaux payants enchaînent : « La culture du gratuit conduit à une boulevardisation de l’information » (Le Temps), « La malpresse mise en cause » (Le Courrier), « La baisse de qualité des médias pèse sur la démocratie suisse » (24 heures)… Baroud d’honneur…
Un résumé de l’étude qui sert de source à ces articles est disponible sur ce site. On y retrouve grosso modo des choses que je répète depuis deux ans sur ce blog :
- « Le glissement de l’utilisation des médias vers une culture gratuite online et offline et la situation financière fortement détériorée entraînent une érosion de la qualité dans la grande tradition journalistique suisse« .
- « Les nouveaux médias, journaux gratuits et sites de nouvelles, mais aussi les radios privées et de nombreux journaux par abonnement, réduisent le monde à des nouvelles d’agences« .
Bon, alors, on fait quoi maintenant ? Tous les médias ont relayé la dépêche, voire développé le thème : la culture du gratuit et la boulevardisation péjorent la qualité de l’information et c’est la démocratie qui paie en définitive les pots cassés. Peut-on s’en foutre royalement si l’enjeu est la démocratie elle-même ? Cette étude a au moins l’avantage d’amener la question sur le terrain politique et les politiques devraient désormais avoir à coeur de se préoccuper plus sérieusement de la question.
Bien sûr, il reste des médias de qualité, certains quotidiens, la radio, des sites internet d’information pertinents. Mais ceux-ci touchent de plus en plus exclusivement un public cultivé et déjà généralement plutôt bien informé. Un autre public, plus jeune et moins formé, reste en marge…
Jusqu’à quand va-t-on attendre avant de prendre de véritables mesures politiques, justement, pour garantir les conditions de la démocratie ? Au nom de quoi les prétendus « journaux » gratuits ont-ils le droit de squatter tous les lieux stratégiques de distribution (gares, arrêts de bus, devant des écoles, etc.) ? Pourquoi les aides à la presse (dans le cadre de l’acheminement postal notamment) sont-elles systématiquement orientées à la baisse ? Pourquoi laisse-t-on impunément des dépliants publicitaires garnis de quelques dépêches d’agences phagocyter impunément le marché publicitaire au détriment de ceux qui pourraient réellement incarner la liberté d’expression ?
On voudrait faire disparaître l’information démocratique qu’on ne s’y prendrait pas autrement… Il faut engager un débat de fond, sur le plan politique, avant qu’il ne soit définitivement trop tard.
Daniel
La Liberté du 30 juin 2010 : Le groupe Hersant devient actionnaire majoritaire du Nouvelliste
http://www.laliberte.ch/index.php?contenu=toutelajournee&depeche=70357
Le groupe français Hersant est désormais actionnaire majoritaire du quotidien valaisan « Le Nouvelliste ». Entre la reprise des publications d’Edipresse par l’éditeur alémanique Tamedia et les visées du français Hersant, la presse suisse romande semble devenue un terrain de conquête médiatique. C’est l’occasion d’un petit bilan (intermédiaire…).
Alors, quels sont les quotidiens romands aujourd’hui. Fermez les yeux et tentez de faire une liste sans tricher…
Combien sont-ils ? Quelle est leur importance ? A qui appartiennent-ils ?
Liste :
Le Temps (Suisse romande) – 146’000 lecteurs – Tamedia et Ringier + quelques autres actionnaires
La Tribune de Genève – 153’000 – Tamedia
Le Courrier (GE et Suisse romande) – 24’000 – Association NAC
24 heures (Vaud) – 228’000 – Tamedia
Le Matin (Suisse romande) – 253’000 – Tamedia
20 Minutes (Suisse romande) – 523’000 – Tamedia
La Côte (Vaud) – 31’000 – Hersant
Le Nouvelliste (Valais) – 112’000 – Hersant
La Liberté (Fribourg) – 99’000 – Imprimerie St-Paul
L’Agefi (Suisse romande) – 17’000 – Groupe international AGEFI (Il s’agit d’un quotidien économique).
L’Express (Neuchâtel) – 62’000 – Hersant
L’Impartial (Neuchâtel) – 40’000 – Hersant
Le Journal du Jura (Jura BE) – 25’000 – Gassmann SA
Le Quotidien jurassien (Jura) – 47’000 – D+P SA
Remarque : le nombre de lecteurs figurant ici provient de l’étude REMP de mars 2010 citée dans ce document.
Vous avez bien compté ? 14 quotidiens… Cela reste proportionnellement plus (par rapport au nombre d’habitants) que dans les pays voisins, mais ce nombre a considérablement diminué pendant les dernières décennies (des fusions, des disparitions et peu ou pas de créations).
Ce bref bilan appelle quelques remarques :
1) 5 quotidiens (avec les 5 plus gros lectorats) appartiennent totalement ou partiellement (dans le cas du Temps) à l’éditeur Tamedia (Tages Anzeiger- ZH). 4 autres quotidiens (les viennent-ensuite…) appartiennent désormais à Hersant. Restent 5 quotidiens : le Journal du Jura (intégré à une plateforme commune éditoriale avec les 4 du groupe Hersant – combien lui reste-t-il de temps ?), l’AGEFI qui appartient à un groupe international et 3 quotidiens qu’on peut alors qualifier d’indépendants : Le Courrier, La Liberté et le Quotidien jurassien (moins de 200’000 lecteurs à eux trois…).
2) Dans cette recherche, tous les quotidiens romands sont qualifiés « d’indépendants » (voir à partir de la page 58).Tous appartiennent à des groupes de presse, et pas à des fabricants d’armements ou d’automobiles, là réside probablement la raison du qualificatif. Au fait, c’est quoi l’indépendance ? Et d’abord, indépendant vis-à-vis de qui, de quoi ?
3) Pour l’essentiel, les quotidiens romands ont encore des bases « cantonales ou locales ». Les exceptions sont : « Le Temps » (qui se préoccupe effectivement d’information au niveau national), « Le Matin » (dont les manchettes racoleuses concernent toute la région romande), « 20 minutes » (qui est abandonné sous les sièges de la plupart des autobus du pays), « Le Courrier » (qui propose désormais des pages GE, VD et NE, mais qui reste très genevois), « L’Agefi » (qui ne parle que d’économie).
4) Pour arriver au « lectorat » du seul journal gratuit, il faut grosso modo additionner toutes les publications hors Tamedia. C’est probablement un indice qui devrait faire considérer différemment la définition des deux lectorats. Au fond, le lectorat de 20 minutes est comparable à celui des imprimés publicitaires distribués dans les boîtes à lettres (les textes parviennent au lecteur sans qu’il fasse d’effort et sont gratuits). Rien à voir avec des journaux payants et qui demandent une lecture attentive et plus longue qu’un trajet en bus.
5) Au-delà de la concentration économique déjà relevée, on peut aussi remarquer que les collaborations entre journaux se sont multipliées. Lorsqu’un ami de Genève me signale un article dans la Tribune, j’ouvre le 24 heures pour le lire aussi. Lorsque j’achète occasionnellement « La Liberté », je ne gagne que peu d’informations par rapport aux pages de ce quotidien publiées par « Le Courrier », à moins de rechercher spécifiquement les informations régionales sur Fribourg. Les journaux de Hersant et le Journal du Jura ont unifié leurs informations et vont étendre le processus au « Nouvelliste ».Plusieurs journaux reprennent des pages entières d’autres publications…
6) La Suisse romande n’a pas encore vu l’apparition d’un quotidien en ligne à proprement parler.
Au fond, c’est surtout à la lecture des différents quotidiens qu’on peut juger de leur indépendance (d’esprit !). Il est toujours frappant, sur une journée particulière, de constater à quel point tous ou presque parlent des mêmes choses, s’abreuvent aux mêmes sources. Et c’est là que j’apprécie plus particulièrement mon abonnement au « Courrier » qui m’apporte au moins quelques pages porteuses de thèmes différents de la masse quotidienne…
Daniel
Après la libération de l’otage Max Göldi
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Le « syndrome de Stockholm« , c’est ainsi qu’on désigne la « propension des otages partageant longtemps la vie de leurs geôliers à développer une empathie, voire une sympathie, ou une contagion émotionnelle avec ces derniers« . Et c’est ce syndrome que m’évoque le retour en Suisse de Max Göldi et les divers commentaires politiques ou médiatiques qui ont suivi.
Depuis lundi, on entend et on lit nombre de critiques et de remises en question adressées aux autorités genevoises et au Conseil fédéral et à Hans-Rudolf Merz en particulier. Par contre, Hannibal Kadhafi et son père s’en tirent sans reproche et les articles de presse se multiplient sur le thème de « comment reprendre les relations économiques avec la Libye ?« . Le premier otage libéré lui-même « en veut à la police genevoise« , alors qu’il faut bien admettre qu’il n’y a aucun rapport objectif entre sa détention arbitraire et l’incident impliquant Hannibal Kadhafi et la police genevoise. C’est d’ailleurs là que réside le scandale et c’est aussi toute la Suisse qui a été prise en otage dans cette affaire.
A cet égard, je suggère d’examiner les conditions qui permettent le développement d’un « syndrome de Stockholm » :
- l’agresseur doit être capable d’une conceptualisation idéologique suffisante pour pouvoir justifier son acte aux yeux de ses victimes.
- il ne doit exister aucun antagonisme ethnique, aucun racisme, ni aucun sentiment de haine des agresseurs à l’égard des otages.
- il est nécessaire que les victimes potentielles n’aient pas été préalablement informées de l’existence de ce syndrome.
Dans le cas libyen, le ravisseur a réussi à faire admettre que son indignation justifiait une prise d’otages n’ayant aucun rapport avec le conflit d’origine et a joué sur sa propre humiliation (en occultant complètement celle des otages). Il n’y avait aucun antagonisme particulier vis-à-vis de ces deux personnes qui travaillaient en Libye : elles n’ont servi que comme monnaie d’échange. Les victimes du syndrome sont ici potentiellement autant les deux otages que la Suisse entière qui a été « prise en otage » diplomatiquement par le leader libyen. Etant donné qu’il est difficile de reconnaître une affaire qui devrait relever du droit commun dans une querelle diplomatique, la troisième condition se trouve à mon sens également réalisée. Je reconnais donc ici un « syndrome de Stockholm« .
Oui, il faut le redire clairement et fortement. Il s’agit d’une prise d’otages et la seule différence avec celles des guérilleros est qu’elle est le fait d’une autorité instituée et reconnue internationalement : l’Etat Libyen. Mais cela la rend encore plus grave… Le rapt est un crime et il n’existe aucune excuse valable pour le défendre.
Cela ne signifie pas que la police genevoise ait été exemplaire, que les politiques genevois et suisses aient été avisés ou efficaces. Non, au contraire, cet enlèvement a mis en lumière une série de faiblesses institutionnelles en Suisse. Mais si on considère que la police a mal agi, c’est devant un tribunal que cela doit se régler. Le sieur Kadhafi junior savait très bien qu’il pouvait s’adresser à la justice, mais les réflexes de voyou de son père l’ont incité à préférer faire justice lui-même en recourant à ce qui est considéré comme un crime par le droit pénal. Les voies de l’Etat de droit ne plaisent pas aux milieux mafieux.
Et justement, à lire et écouter les commentaires depuis quelques jours, on pourrait en venir à douter. Ce sont les autorités genevoises et le Conseil fédéral qui sont sur le banc des accusés. Je souhaite donc rappeler ici que personne n’est particulièrement brillant face à des preneurs d’otages. Les solutions sont toujours mauvaises et on finit toujours par perdre un peu la face !
Le quotidien « La Liberté » montrait au surplus dans son édition de mardi 15 juin que la Libye souffrait du gel des relations avec la Suisse et que la situation qui dure depuis deux ans lui crée toute une série de difficultés. Je m’étonne donc de voir les autorités suisses prêtes à se plier dans tous les sens et sans condition vis-à-vis de voyous auxquels il semblerait qu’elles viennent de verser une rançon.
Dans le cas des ravisseurs d’enfants, on a désormais mis au point une procédure d’alerte enlèvement. Dans le cas de l’enlèvement de citoyens suisses à l’étranger, on ne prévoit apparemment rien, si ce n’est le versement de rançons et toutes les courbettes diplomatiques imaginables. Et le prix d’un otage suisse est désormais connu et pourrait susciter des vocations. Dans ces conditions, on pourrait au moins s’attendre à une attitude de non-coopération avec les ravisseurs.
L’interdiction de séjour du voyou Hannibal Kadhafi semblerait un minimum à exiger et je m’étonne de n’entendre qu’un parti extrémiste évoquer cette possibilité. Parce que désormais, cet huluberlu pourra faire à peu près n’importe quoi et plus aucune autorité n’osera réagir !
La Suisse s’honorerait en osant prendre de la distance et mettre les relations officielles avec la Libye entre parenthèses durant une certaine période.
Daniel
Autour des informations relatives à la crise financière en Grèce
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On se croirait dans le championnat d’Europe de football (que la Grèce avait remporté en 2004 - l’Allemagne ayant été éliminée avant les quarts de finale…). Il y a les Allemands, il y a les Grecs… qu’on oppose comme s’il s’agissait de compétition sportive, en opposant globalement un pays à l’autre et en faisant fi des conflits internes. Comme quand votre voisin vous croise dans l’escalier en déclarant : « On a gagné !« .
Et il en va de même lorsqu’on évoque les risques financiers touchant le Portugal, l’Espagne, l’Irlande et tant d’autres. Ce sont les autres équipes en lice… Je reste ébahi à quel point on évoque peu les différences entre acteurs économiques au sein d’un même pays : tous les Grecs ne sont pas à la même enseigne. On assiste à une gigantesque réification… comme au foot : la Grèce joue contre l’Allemagne ! (Et ce n’est certainement pas la finale…).
Ce n’est pas la seule chose étonnante dans les informations quotidiennes relatives à cette crise de la dette publique. Les commentateurs rivalisent d’imagination dans le champ lexical du bon samaritain : il est question d’aide, de soutien, de solidarité, d’assistance, de sauvetage, de secours et même de subsides et de générosité envers la Grèce. Oserait-t-on tout de même rappeler que les montants en dizaines de milliards mobilisés sont des prêts et non des dons…. Il y a deux jours, une de mes collègues de travail évoquait sa compréhension pour les pauvres allemands qui ne voulaient pas « donner » de l’argent à la Grèce. Pas de doute, un peu plus de clarté dans l’information pourrait contribuer à une bonne compréhension.
D’ailleurs, il est piquant de constater que ces aides sous forme de prêts sont avant tout une manière de contourner les « marchés » (j’y reviens de suite…) : en fait, l’Allemagne et les autres Etats européens vont simplement emprunter l’argent sur les marchés (à des taux plus bas que les Grecs), puis reprêter ce même argent aux Grecs un peu plus cher en réalisant une marge au passage (ben oui…. il y a un risque qui est rémunéré !). Mais si votre banquier refinance une partie de votre hypothèque à un taux plus élevé… est-ce que racontez à vos amis qu’il vous a « aidé » ?
« Les marchés » font ceci ou cela, exigent, décident, etc. « Les marchés » sont personnifiés. Mais ils restent toutefois assez mystérieux… ces gens-là. Les journaux parlent d’eux sans trop de précisions. Eh bien, « les marchés« , ce sont ici notamment ceux qui possèdent, ou ont possédé, les titres de la dette grecque. Ce sont entre autres des banques (principalement allemandes et françaises) qui peuvent emprunter à des taux très bas auprès de la Banque centrale européenne (ce que les Etats n’ont pas le droit de faire) et qui reprêtent ensuite à des taux plus élevés aux Etats en achetant leurs obligations. Ces titres peuvent d’ailleurs encore servir aux banques à obtenir de nouveaux prêts lorsqu’ils sont déposés comme garantie auprès de la Banque centrale. Bingo pour les marchés !
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A longueur de pages ou de téléjournal, on parle de « l’aide à la Grèce« . Mais maintenant que le plan a été adopté, on est en droit de se demander qui a été le plus aidé : les habitants, rentiers, travailleurs, fonctionnaires grecs ou les banquiers allemands et français qui détiennent les titres de l’Etat grec. Poser la question, c’est en quelque sorte y répondre. Parce qu’une alternative aurait consisté à rééchelonner la dette grecque… mais cela aurait été moins rigolo pour les banques. Au passage, on remarquera que le programme d’économies de l’Etat grec ne touche pas du tout les dépenses militaires, pourtant les plus élevées de l’Union européenne…
Et tout cela sans s’attarder encore sur l’avalanche de stéréotypes proposés à longueur de page, avec une Allemagne « vertueuse » et une Grèce « laxiste« . A cet égard, il est intéressant de lire cette série d’articles de Jacques Sapir qui s’attaque aux mythes de cette crise (1,2 et 3) : cela relativise bien des choses. Et le comble c’est bien cette trouvaille acronymique : « les PIGS » (Portugal, Irland, Greece, Spain). Faut-il comprendre que les Allemands ont l’intention de les transformer en Bratwurst ?
S’il faut vraiment retenir la métaphore footballistique, il faudrait alors noter que le match réel a opposé la Finance aux Etats et qu’il se termine sur un score de 2 à 0 : les financiers sont en train de réussir à échapper à une régulation plus contraignante tout en dictant leurs conditions aux Etats.
Et je viens juste de découvrir cet article sur Largeur.com qui complètera mon propos.
Daniel