A partir d’un article du blog de Thierry Herman : La démocratie en danger ?
http://www.thierryherman.ch/reflexions/la-democratie-en-danger/#comments
Ces derniers temps, la réflexion démocratique nous met face à un questionnement important : dans quelle mesure les gigantesques opérations marketing ont-elles une influence déterminante sur les résultats de votations ? Je ne sais pas s’il existe des études sérieuses sur cette question en Suisse, mais la question n’est vraiment pas intérêt, surtout quand on observe l’apparent retournement d’opinion effectué à propos de l’initiative fiscale du PS ou les succès des campagnes massives de matraquage de l’UDC.
J’ai relevé cet article sur le site de Thierry Herman (que je conseille, il y a de bons articles à lire) et j’ai proposé un commentaire. Pour ne pas faire de jaloux avec les lecteurs de mon propre blog , je propose aussi mon commentaire ici (mais il faudrait lire d’abord l’article) :
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Commentaire :
Je suis d’accord avec l’essentiel de cet article : on ne peut pas se contenter de remettre en cause l’extraordinaire disproportion des moyens financiers pour les campagnes de votation (et les élections). Il faut aussi travailler sur les contenus et leur mise en forme.
Mais, il y a tout de même un grand MAIS : lorsqu’on veut renvoyer les minoritaires financiers à leurs études, on leur répond (à la Windisch) que le peuple n’est pas une masse bêlante, ce qui a d’ailleurs l’avantage de le caresser dans le sens du poil. Et on raisonne en pensant au peuple tout entier.
La votation de ce weekend s’est jouée à 53 % contre 47 %, grosso modo. Si l’initiative avait été refusée par 51 % des électeurs, on aurait titré sur une victoire de la gauche qui s’était opposée à la fois à l’initiative et au contre-projet. 49 % pour l’initiative, c’est une défaite, 53 % c’est une victoire. La différence n’est pas énorme…
Les masses d’argent investies dans les campagnes ne le sont pas pour convaincre 100 % de la population. Elles servent à convaincre un nombre limité d’électeurs, entre 5 et 20 % selon les cas, qu’on qualifie d’indécis. Ce sont ceux qui ne lisent pas les textes en votation, ni les articles des journaux qui tentent d’approfondir les questions et qui ne participent pas à des discussions ouvertes. Ils sont particulièrement influençables et touchés par le déchaînement de propagande de l’UDC qui a précisément les moyens financiers de répéter à très grande échelle ses slogans simplistes et ses images chocs. Comme les publicités…
Il n’est donc pas question de dire que le peuple est une gigantesque masse stupide et prête à se laisser manipuler, mais il faut admettre qu’il y a une fraction des électeurs qui est très influençable car peu formée et mal informée. Cela ne veut pas dire qu’on manque de respect vis-à-vis de ces gens, juste qu’on admet qu’il existent bien.
J’ai tenté une expérience amusante dans plusieurs de mes classes de maturité professionnelle :
- j’ai demandé d’abord qui savait déjà ce qu’il allait voter : un grand nombre de mains se sont levées.
- ensuite, j’ai demandé qui avait lu les textes de l’initiative et du contre-projet : seuls quelques mains se sont levées.
Puis j’ai demandé qu’on m’explique les enjeux de la votation… C’est très instructif. Et mes élèves sont très loin d’être des idiots : au contraire, ils ont un intérêt marqué pour ces questions politiques et apportent des arguments. Mais si eux ne lisent pas les textes, est-ce que la population dont je parlais plus haut les lit ? Certainement pas.
Je pense qu’il faudrait affronter un tabou. On fait beaucoup de sondages d’opinion pour tenter d’établir les préférences des citoyens avant les votations. Pourquoi ne tenterait-t-on pas des sondages pour examiner quelle est la connaissance des sujets ? De quoi a-t-on peur ?
“Si j’avais du temps et des moyens, je créerais un site Internet proche de cequeludcvouscache, mais qui aurait plus de gages de transparence, de neutralité et d’indépendance et qui critiquerait les partis de quelque bord qu’ils soient.”
Chiche ?
Un site internet, ce n’est pas si compliqué, beaucoup de jeunes savent faire. Pour le contenu, cela devrait être un travail collectif qui pourrait être le fait d’une “association pour l’autodéfense intellectuelle”. Personnellement, je serais partant (pas tout de suite, mais dans quelques temps si cela pouvait être planifié) pour être partie prenante d’un tel projet.
A réfléchir sérieusement.
Daniel