Le Temps du 15 mai 2009 : Les coûts de la santé (M.H. Miauton)
http://www.letemps.ch/Page/Uuid/fd6de864-40c7-11de-9172-2e847dad1d5e/Les_co%C3%BBts_de_la_sant%C3%A9
Vous aviez cru que la question des coûts de la santé et des assurances maladie était complexe ? Eh bien non… il vous suffit de vous pencher sur la chronique de Marie-Hélène Miauton, dans le Temps du 15 mai, pour découvrir l’extrême simplicité de la question !
(Visitez le site d’où provient cette image : tordant !)
C’est vrai, chaque année reviennent les mêmes discussions, les mêmes antagonismes, les mêmes accusations, dans la perspective des augmentations de primes qui ne manqueront pas de venir clore l’année en cours (même si, lorsqu’une votation importante est en vue, elles deviennent soudain moins forte…). Chacun des protagoniste du système de santé – assurés compris – accuse les autres d’être responsable de l’augmentation des coûts. Le débat revient comme une ritournelle sans qu’on ait l’impression d’avancer d’une année à l’autre.
Mais notre sauveur est arrivé : la chroniqueuse du vendredi, dans le quotidien le Temps, va nous expliquer très simplement (elle le dit elle-même : « c’est très simple« ) pourquoi ça coince. La question de la santé, c’est très facile à comprendre : il y a d’un côté des patients qui veulent se faire soigner et de l’autre des soignants qui souhaitent soigner pour s’assurer un revenu. C’était donc trop simple et on a inventé la LAMAL pour tout compliquer en constituant un intermédiaire « tiers-payant » entre les deux principaux acteurs. De la logique d’assurance, qui veut que le risque soit socialisé, Mme Miauton ne souffle mot : cela risquerait d’inciter à voir la santé comme autre chose qu’un simple « marché ».
Parce que c’est bien de cela qu’il s’agit : selon elle, « le client n’a aucune raison de se priver de soins » et « le fournisseur ne va évidemment pas freiner la consommation« . Suivez le vocabulaire : il ne s’agit pas ici de patients ou de malades et de médecin ou d’infirmières, mais bien de clients, de fournisseur et de consommation ! Et dans un tel marché tout simple, la logique imparable de Mme Miauton fait des merveilles : « Là réside la seule explication fondamentale à l’augmentation des coûts de la santé sauf à prétendre que la population est toujours plus malade, ce qui ne se vérifie en rien« . Tout est dit, les uns consomment trop ce que les autres se font un plaisir de fournir : là se trouve la seule explication. La maladie est un choix libre et rationnel du consommateur… Face à un tel raisonnement, même le qualificatif de simpliste devient insuffisant !
L’augmentation de l’espérance de vie, le développement de nouvelles technologies médicales (coûteuses, évidemment !), la création de nouvelles thérapies, l’amélioration du confort des malades (moins de malades par chambre commune, par exemple – mais c’est pour les pauvres, alors elle s’en fiche !), le développement de pathologies « sociales » comme l’obésité, l’anorexie, les toxicomanies, et tant d’autres, tout cela n’existe pas aux yeux de la chroniqueuse. Non, c’est tout simple : les « clients » ( qui se jugent « en droit de consommer ») consomment trop ce que « fournisseurs » (qui assurent leurs revenus) produisent trop. La question de la santé est ramenée à une logique de supermarché !
Mais le simplisme de l’analyse ne va pas s’arrêter là : il y a aussi des bons et des méchants (comme dans les films de Walt Disney !). Les gentils, ce sont les assureurs et en particulier Santésuisse qui « fait des propositions alors que son rôle lui permettrait de rester discrète« . Ces pauvres gens s’ingénient à chercher des solutions pour le bien public sans être reconnus. Ici, on ne parle évidemment pas des réserves accumulées et gérées habilement, sans qu’on sache jamais si les profits réalisés avec les réserves de l’assurance de base glissent subrepticement dans les résultats affichés par les assurances complémentaires qui en distribuent les bénéfices à leur propriétaire. Ces discrètes et opaques comptabilités étant contrôlées par si peu de contrôleurs… mais chut ! Pour Mme Miauton, les assureurs sont des gens biens qui ne chercheraient en rien à favoriser leur intérêt personnel, au contraire des patients et des médecins qui se comportent en vampires…
Et puis, inévitablement, il y a les méchants : ce rôle est tenu par la gauche « qui regarde calmement pourrir une situation qui mènera tout droit à la Caisse unique et aux primes selon les revenus« , deux solutions diaboliques aux yeux de Mme Miauton. La gauche, de ce sont des méchants, des machiavéliques, des bolchéviques aux couteaux entre les dents qui ne pensent qu’à détruire ce qui existe, évidemment. La droite, par contre, est constituée de chevaliers blancs qui luttent contre un système de santé infernal : aucune trace chez ces gens de défense d’intérêts particuliers. Les lobbyistes de l’assemblée fédérale ont dû disparaître dans quelque oubliette mentale.
On ne peut exclure qu’il existe des gens à gauche qui voient d’un bon oeil le pourrissement de la situation, mais on ne peut pas non plus oublier ceux qui encaissent les bénéfices des assurances complémentaires (éventuellement dopés aux profits financiers réalisés avec les fonds de l’assurance de base) et qui constituent les troupes de la droite. Si un s’assure les services de tant de lobbyistes, c’est tout de même que cela vaut la peine !
Le Temps est le quotidien le plus proche de la droite patronale et nul ne songerait à lui reprocher son positionnement politique. Par contre, on peut s’interroger sur le choix des chroniqueurs. Sur une question comme celle de la santé, on pourrait attendre des arguments un peu plus stimulants et un peu moins proches des scénarios les plus manichéens des films grand public américains. Mme Miauton finit en évoquant une gauche machiaélique « que nul ne démasque« . Et si on démasquait Mme Miauton comme lobbyiste simpliste et manipulatrice ?
Daniel
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16 mai, 2009 à 13:46
Une lecture réconfortante après celle atterrante de la chronique de Mme Miauton. Je crains qu’elle n’ait même pas écrit cela pour défendre des intérêts. Comment est-ce que Le Temps peut encore infliger ça à ses lecteurs?