Piques et répliques – 2

Quelques réflexions critiques sur tout et rien

Archive pour avril, 2008


Porno sur les natels : chacun ses chiffres, chacun sa réalité !

29 avril, 2008
Des statistiques... | 2 réponses »

28 avril : 20 minutes, Le Matin online, sites internets de RSR 1 et de la télévision suisse romande

Des chercheurs de l’Université de Zürich se sont intéressés à l’utilisation des téléphones portables par les adolescents suisses et les ont questionné. Résultat : une étude dont les chiffres apparaissaient hier dans les médias suisses. Mais chaque média retient les chiffres qui lui plaisent et la cacophonie est totale.

Les titres sont déjà révélateurs des divergences d’interprétation. 20 minutes titre avec « Un élève sur deux materait du porno sur son portable » et Le Matin avec « Sexe à gogo sur les natels » alors que la TSR propose sobrement « Jeunes et portables : étude sur les habitudes » et que la Radio suisse romande annonce « Porno et violence sur les natels : la majorité des jeunes refuse de les regarder, selon une étude ». D’un média à l’autre, on glisse d’un constat rassurant au catastrophisme le plus débridé…. à propos de la même étude !!!

 

Porno sur les natels : chacun ses chiffres, chacun sa réalité ! dans Des statistiques... swisstxt20080428_9028110_2

 

Quelques chiffres viennent renforcer le propos : Le Matin signale que près de la moitié des 12-16 ans ont reconnu avoir visionné des images pornographiques sur leur téléphone portable et que ce chiffre monte à 63 % si on ne retient que les garçons dans l’analyse. Le quotidien complète ses affirmations par le fait que les vidéos les plus « demandées » seraient celles mettant en scène des rapports sexuels avec des animaux. On retrouve les mêmes chiffres et les mêmes assertions dans « 20 minutes ».

Mais lorsqu’on se penche sur l’information donnée par la TSR et la RSR, on découvre une réalité divergente : la majorité des jeunes refuse de regarder ces images, deux tiers des garçons et 94 % des filles ont déclaré n’avoir jamais possédé de telles images sur leur natel et seuls 15 % des garçons et 5 % des filles les trouvent amusantes.

Comment trancher entre les deux quotidiens sensationnalistes et les régies publiques ?

C’est dans les deux quotidiens, glissée plus discrètement dans le corps du texte des articles, qu’on va trouver une partie de la solution. Le « 20 minutes » dit qu’un écolier sur deux « admet avoir été au moins une fois en contact avec des photos ou films à contenu violent ou sexuel ». Ceux-ci ont donc pu accidentellement se retrouver face à une image qui les a dégoûté : ils l’ont reconnu auprès des chercheurs. Le quotidien les transforme dès lors en « mateurs de porno ». Quant au Matin online, il signale tout à la fin de l’article que seuls 45 % des garçons condamnent le porno sur natel et que 6 % trouve cela « très marrant ». On est loin du « sexe à gogo »…

Il serait faux de vouloir relativiser à tout prix les dangers de la pornographie dure sur les natels des jeunes, mais il est tout aussi contre-productif et scandaleux de transformer une grande partie de la jeunesse en pervers sexuels. La déontologie de certains journaux est à vendre.

Résumons : une étude montre qu’une minorité de jeunes est adepte de vidéos pornos sur les natels et qu’une majorité à subi une de ces images au moins une fois. Avec quoi faut-il titrer, monsieur le rédacteur ? A quand un article sérieux et documenté sur ce problème ?

Dani

Bonus aujourd’hui 29 avril : « La Liberté » de Fribourg résume aussi l’affaire dans une brève assez éloquente : Deux tiers des garçons et 94 % des filles ont déclaré ne jamais avoir eu de telles images sur leur portable. 62 % admettent avoir eu des images pornographiques et 28 % de la violence. Donc, ils en ont eu, mais n’en ont pas eu !!! Qui comprendra ?

http://www.tsr.ch/tsr/index.html?siteSect=200001&sid=9028014

http://www.lematin.ch/fr/actu/suisse/sexe-a-gogo-sur-les-natels_9-144315

http://www.20min.ch/ro/rechercher/story/22844464

http://info.rsr.ch/fr/rsr.html?siteSect=2101&sid=9027819&cKey=1209401771000

Faut-il encore gonfler les résultats de l’UDC ?

28 avril, 2008
Scène médiatique | 2 réponses »

Lundi 28 avril, lendemain d’élections communales à Neuchâtel, on n’entend pas du tout parler de l’UDC ni de la non-élection de Christoph Blocher….. Presque étonnant ! Et pourtant, si l’UDC avait réalisé une percée dans une ou plusieurs des villes neuchâteloises, on aurait pu compter sur la ritournelle habituelle…

Aujourd’hui, je vais donc me permettre de revenir sur un titre plus ancien : le 8 avril, LE TEMPS titrait : « Dans quatre cantons, le parti a profité des remous de l’éviction de Christoph Blocher ». Au fond, ce journal ne faisait rien d’autre qu’écrire la même chose que quasiment toute la presse romande : si l’UDC progressait dans les cantons de Thurgovie, St-Gall, Schwytz et Uri, c’était donc tout naturellement les suites de la non-élection du leader de l’UDC et les électeurs votaient fâchés. Ce sont ces affirmations qui m’ont incité à imaginer l’ouverture de ce blog, pour montrer à quel point on faisait souvent dire n’importe quoi aux chiffres et aux mots…

Or, encore une fois, la presse écrit trop vite, oublie de calculer, de comparer et se permet des conclusions hâtives sans vérifications sérieuses. Voici pourquoi :

Dans ces différents cantons, l’UDC a réalisé d’excellents scores, comparés aux scores qu’elle avait réalisé lors des élections cantonales précédentes, généralement 4 ans avant. Cela illustre clairement la progression générale de ce parti, que ce soit lors d’élections fédérales ou cantonales.

Mais si les journaux, et ici LE TEMPS, souhaitent montrer que ces résultats sont dus à la réaction des électeurs suite à l’élection du conseil fédéral en décembre 2007, alors c’est avec les résultats des élections fédérales d’octobre 2007 qu’ils doivent comparer. Au fond, il faudrait alors admettre que ce sont bien ceux des électeurs qui se sont mobilisés à ce moment-là qui, déçus, reprendraient le chemin des urnes avec un bulletin UDC. Or, que découvre-t-on après quelques recherches ? Que ce soit à St-Gall, en Thurgovie ou à Schwytz, les résultats de l’UDC ont été inférieurs à ceux d’octobre 2007. Ce n’est qu’à Uri, où aucun UDC ne se présentait au Conseil national en octobre 2007 que le résultat est naturellement meilleur. Constater une progression cantonale de l’UDC est une chose. En faire une conséquence des élections fédérales en est une autre et il devient à ce moment-là maladroit, sinon malhonnête, de ne pas se référer aux chiffres des élections d’octobre 2007 pour arriver à ce genre de conclusion. Voyons donc les chiffres :

Thurgovie : 42,3 % en octobre 2007 et 35,8 % aux élections cantonales en 2008

St-Gall : 35,8 % en octobre 2007 et 34,1 % aux élections cantonales en 2008

Schwytz : 45 % en octobre 2007 et 37,5 % aux élections cantonales en 2008

(Ces chiffres ont été proposés par l’Hebdo, quelques temps après les élections cantonales et les conclusions hâtives. Bravo à l’hebdomadaire pour ce recul).

Conclusion : les résultats de l’UDC sont ascendants, cela ne fait pas de doute et se traduit très clairement dans les résultats des élections cantonales. Mais les expliquer par les événements fédéraux de décembre 2007, c’est de la « désinformation ». Les élections fédérales et cantonales ne sont pas forcément liées et les problématiques locales comptent aussi. Puissent les journalistes, souvent trop rapides au détriment de la qualité de leurs informations, penser à effectuer au moins quelques vérifications !

Dani

L’association suisse des spiritueux serait une référence statistique !

26 avril, 2008
Divers | Commentaires fermés

20 minutes du vendredi 25 avril 2008 – « Le couvre-feu de l’alcool criminalise les jeunes »

« 20 minutes » relaie ce vendredi les résultats d’une étude présentée par le « Groupement suisse des spiritueux de marque » à propos de la consommation d’alcool. Or l’article présente les faits comme relevant d’une objectivité sans faille, en affirmant notamment que les jeunes ne consomment que 11 % de toutes les boissons alcoolisées.

Bien sûr, l’article signale tout de même que ces chiffres émanent du lobby des représentant des alcools de marque sur le marché suisse, mais nulle part l’article ne remet en cause ces affirmations comme relevant du débat partisan sur les mesures politiques de prévention de vis-à-vis des jeunes. C’est la vente « nocturne » d’alcool qui est en jeu et on ne plaisante pas avec les affaires ! En somme, l’article de 20 minutes relaie sans esprit critique les affirmations des vendeurs d’alcool, comme une annonce publicitaire que le même groupement aurait dû payer au prix fort. Le verbe « criminaliser » vient opportunément renforcer l’effet. Merci du cadeau…

Prenons toutefois la peine d’examiner de plus près les chiffres mentionnés par l’article :

Les jeunes de la tranche 18-24 ans ne consomment « que » 11 % de toutes les boissons alcoolisées : le chiffre peut apparaître faible à certains, mais il faudrait bien signaler que la tranche d’âge correspond à 8,3 % de la population de la Suisse (chiffres OFS 2006) et que ces jeunes boivent donc proportionnellement plus que les autres tranches d’âges. Même si on enlève les moins de 15 ans de la statistique en émettant la supposition qu’ils ne boivent pas encore d’alcool, on arrive à 9,8 %, soit toujours moins que 11 %. Décidément non, 11 % de tout l’alcool, ce n’est pas si peu.

D’autre part, l’article mentionne un autre « que » : les excès ne concernent que 25 % des moins de 25 ans et le journaliste prend la peine de préciser qu’il s’agit de 3,6 % de la population. Alors quoi, sur deux familles avec 2 enfants chacune, on a en moyenne un jeune qui boit de l’alcool avec excès et ce serait si négligeable. C’est peut-être l’avis intéressé du producteur d’alcool, mais on pourrait attendre un peu plus de recul de la part du journaliste, d’autant plus qu’il écrit dans un journal qui vise ouvertement le public jeune.

Encore une fois, on peut faire dire presque n’importe quoi à des chiffres. C’est le lecteur qui doit rester vigilant et user de la calculette !

Dani

Un crocodile ou un alligator, c’est caïman la même chose !

24 avril, 2008
Divers | Commentaires fermés

20 minutes du 24 avril 2008, page 17

Sous le titre « Elle trouve un alligator en pleine nuit dans sa cuisine », 20 minutes relaie une dépêche de l’Agence France presse écrite par un journaliste qui se perd quelque peu parmi les reptiles de l’ordre des crocodiliens.

 

Un crocodile ou un alligator, c'est caïman la même chose ! american_alligator2 Probablement pour éviter une répétition un peu lourde (il utilise aussi deux fois le mot reptile), l’auteur de l’article parle de la découverte d’un caïman dans la cuisine, puis précise que l’habitante appelle le numéro d’urgence dès qu’elle aperçoit l’alligator, avant d’ajouter que le caïman aurait cassé une porte et de finir par les nombreux incidents impliquant des alligators… Y aurait-il eu deux animaux différents en même temps dans cette maison ?

Rappelons donc que le caïman est un crocodilien certes proche des alligators, mais passablement différent (mais il existe différentes espèces de caïmans et d’alligators, ce n’est pas simple). Les caïmans sont originaires d’Amérique centrale et du sud. Ici, en Floride, c’est manifestement d’un alligator qu’il s’est agi, animal qu’on peut effectivement rencontrer aux Etats-unis.

Au fond, le journaliste aurait pu encore varier davantage en utilisant les termes de crocodile, de gavial et pourquoi pas de varan. En lorsqu’il fera un article sur les crapauds, qu’il ne manque pas d’évoquer aussi les grenouilles ou les rainettes ! Si on ne connaît pas bien les reptiles, ce qui est tout à fait excusable, un petit tour dans une encyclopédie peut éviter d’écrire des bêtises. Même si l’enjeu est ici nul, la crédibilité de la presse est à ce prix…

Dani

On peut trouver une version courte de l’article en ligne sur le site de 20 minutes : http://www.20min.ch/ro/news/insolite/story/12586707. Cette fois-ci, c’est le caïman qui vole la vedette et l’alligator qui se cache dans le texte… ;-)

A noter que le « Matin bleu » n’est pas meilleur en « herpétologie », son article confondant aussi alligators et caïmans.

Rois des écolos…. ? Mon oeil…

22 avril, 2008
Divers | 1 réponse »

20 minutes – Mardi 22 avril 2008 En Une : « Les Suisses sont les rois des écolos »

Le chapeau du 20 minutes nous dit simplement que neuf suisses sur dix pratiquent l’écologie active (c’est ce qu’ils disent !), s’appuyant sur le fait que notre pays fait partie du « top 5″ du recyclage et que le réchauffement climatique y est considéré par 55 % des habitants comme un danger.

La belle affaire…

Donc, un pays dont 45 % des habitants ne considèrent pas le réchauffement climatique comme un danger (jusqu’ici…..tout va bien !) est le pays des rois des écolos. Toujours en première page, le journal dit bien que renoncer à sa voiture reste un sujet tabou. 47 % des sondés disent faire un effort pour diminuer l’usage de leur voiture; la majorité reconnaît donc ne pas faire un tel effort !!!

Vraiment, les titres n’hésitent pas devant les superlatifs. A l’heure où nos rues se chargent de véhicules 4×4, où la consommation d’énergie par habitant continue d’augmenter à un rythme soutenu, où les produits agricoles hors-saison abondent dans nos supermarchés, où les déchets spéciaux s’accumulent suite à l’obsolescence rapides de nombreux objets de consommation (combien de temps dure un téléphone portable avant d’être remplacé par un nouveau ?), où les gaz à effet de serre émis continuent à croître, peut-on vraiment honnêtement se targuer d’être des modèles en matière d’écologie ?

 

Rois des écolos.... ? Mon oeil... pollution

 

Au fond, le titre de 20 minutes est soutenu par une seule idée : le fait que les Suisses fassent un peu mieux que les autres, en particulier dans le tri des déchets et dans le recyclage. Mais c’est de l’autosatisfaction facile et un constat d’aveugle : bien sûr, « l’écologie du riche » qui soigne son environnement immédiat et trie soigneusement ses déchets a bonne presse chez nous. Mais qu’en est-il des (trop) nombreux produits agricoles et industriels que nous faisons venir du bout du monde ? On va imputer cette pollution (production et transport) à la Chine, à l’Inde ou à l’Australie, mais le destinataire final des produits est bien chez nous, en Occident, et notamment en Suisse.

Faire produire et polluer les autres pour sa propre consommation….

Non, nous ne sommes pas les « rois des écolos ». Ce titre n’est qu’ un attrappe-couillon….un de plus !

Dani

Quand la hausse des délits sexuels évoque une baisse…

20 avril, 2008
Des statistiques... | Commentaires fermés

Dépêche de l’ATS, dans Le Temps du samedi 19 avril 2008

En page 15 du quotidien, un article titre « Les délits sexuels en hausse dans le canton de Fribourg » suite à la présentation des statistique de la police cantonale pour l’année 2007.

Le citoyen assurément peut y aller de son inquiétude, frappé par ce titre, surtout s’il ne lit pas le reste de l’article (ce qui est souvent le cas, reconnaissons-le). Ainsi, il craindra cette augmentation apparente des viols, des attentats à la pudeur et autres contraintes sexuelles…

A juste titre ? Voyons donc cet article…

Le début de l’article indique tout d’abord un recul de la criminalité dans le canton de Fribourg en 2007. Tiens, pourquoi n’ont-ils pas décidé de faire le titre avec ça ? Manifestement, on préfère privilégier les mauvaises nouvelles, quitte à devoir les chercher dans le détail de la statistique. Poursuivons…

Après l’évocation de ce qui fait le poids des statistiques (les infractions contre le patrimoine : vols, cambriolages, etc.), on finit par arriver au 4ème paragraphe à la question des délits sexuels. Et là, je cite l’article :

- Les délits sexuels ont pris l’ascenseur en 2007 dans le canton de Fribourg.

- Ce sont surtout celles (les infractions) liées aux nouvelles technologies qui sont en hausse.

- les types d’infractions les plus graves, soit les actes d’ordre sexuel avec des enfants, la contrainte sexuelle et le viol sont heureusement en baisse.

- Pour ce qui est des viols, il en a été enregistré huit, soit le chiffre le plus bas des cinq dernières années.

- Ce sont les dénonciations pour pornographie illégale qui gonflent la statistique.

Alors quoi ? Eh bien, il y a un manque de cohérence entre ce titre, qui évoque une augmentation du danger et le constat de la police évoqué plus précisément dans l’article. Si on enregistre ce chiffre en augmentation, ce n’est pas à cause d’une augmentation des agressions sexuelles, mais plus probablement à cause d’évolutions de la technologie et de sa maîtrise par la population : plus de sites internet illégaux, plus de capacité de trouver ces images chez certains, plus de circulation d’images sur des portables plus perfectionnées qu’auparavant, etc.

Mais il est tellement plus accrocheur de parler d’une hausse des délits sexuels que de mettre en évidence une évolution particulière que le journaliste responsable de la titraille n’a pas su résister. Dommage de voir un journal dit de référence céder à la mode des journaux gratuits…

Dani

Quand la hausse des délits sexuels évoque une baisse... dans Des statistiques... 499486279_504dfe09d2_o

 

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